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« Mon voyage, que je croyais temporaire,

s'éternise »

Si le rap prend de plus en plus d’importance en Syrie, il reste quand même très difficile à pratiquer librement. C'est probablement à cause de ses textes forts et engagés que Mohammed et un autre membre de son groupe se sont retrouvés derrière les barreaux en 2012. Il garde de cette expérience un souvenir glaçant : Â« je souhaite ne jamais y retourner. Je souhaite que personne ne sache jamais ce que c'est Â».

Confronté à la répression, il décide de fuir la Syrie. Mais pour aller où ? Mohammed ne le savait pas encore. Une chose est sûre, il fallait qu’il quitte le pays, devenu trop dangereux, en attendant que les choses se calment. À l’époque, il pensait encore que c'était provisoire, et qu’il rentrerait vite à la maison. Son départ est précipité, mais il décide de mettre ce temps à profit et poursuit ses études. Une université italienne accepte de l'accueillir, il part donc à Rome pour suivre un master d’économie politique pendant deux ans. Un temps pendant lequel il continue de rapper, d'informer par ses textes à propos de la situation en Syrie, de forger son engagement politique, et découvre l'Europe.

 

 

« On ne vient pas par luxe, mais parce qu’on a pas le choix »

 

 

Son diplôme décroché, il aimerait rentrer en Syrie mais la situation là bas n'a pas changé. Elle s'est même aggravée. Il se voit obligé de rallonger son voyage, et trouve en Berlin un nouveau point d'attache : Â« ce qui m'a plu dans cette ville, c'est son énergie, son ouverture d'esprit. Ici, c'est facile d'être un artiste Â». 

Voilà maintenant deux ans qu'il est installé dans la capitale allemande. Son voyage, qu’il pensait temporaire, s’éternise : 

Une impasse. C’est ainsi que Mohammed vit sa situation actuelle. Le rappeur ne peut ni retourner en Syrie, ni se sentir pleinement chez lui à Berlin. La ville dans laquelle il s’est installé en 2014 se révèle peu à peu sous un nouveau jour : « je ressens du racisme au quotidien, mais Ã§a ne me fait pas peur. J’ai vécu tellement pire auparavant Â».

 

Mohammed essaie malgré tout de se reconstruire une vie loin de la Syrie. Il s'est fait un cercle d'amis, une petite copine, mais a toujours du mal à trouver sa place. Â« Ici, je suis accueilli comme un touriste, pas comme un réfugié qui a dû fuir. Pas non plus comme un immigré qui aurait un jour une chance de s’installer de façon permanente. Il faut que les gens comprennent qu'on ne vient pas par luxe mais parce qu'on n'a pas le choix ». L'attente devient interminable. C’est la désillusion pour l’artiste qui n’espère plus qu’une chose : que le conflit cesse, pour pouvoir rentrer dans son pays. À l'heure actuelle, la situation est loin d'être résolue en Syrie. Les troupes de Bachar Al-Assad continuent de terroriser le pays. Comme Mohammed, 4,8 millions de personnes ont fuit la Syrie en cinq ans.

 

 

Textes, photos et vidéos

Jorina Poirot et Jeanne Travers

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